Juridique

Critères de discrimination : les éléments clés à connaître

1 580 plaintes pour discrimination sont enregistrées chaque mois. Derrière ce chiffre, ce sont des carrières freinées, des rêves brisés, parfois des vies bouleversées. Pourtant, la frontière entre une décision légitime et une discrimination demeure, pour beaucoup, floue. Comment distinguer ce qui relève d’un choix d’entreprise et ce qui transgresse la loi ?

Des exceptions jalonnent le paysage juridique, notamment lorsque la nature du poste l’impose ou au nom de l’intérêt collectif en matière de santé. Les recours existent, notamment auprès du Défenseur des droits. Mais encore faut-il être capable d’identifier avec précision le critère en cause. Cette étape, souvent négligée, conditionne la suite de toute démarche.

Discrimination : de quoi parle-t-on vraiment ?

La discrimination en entreprise ne se résume pas à un vague sentiment d’injustice. Le droit français encadre ce sujet avec rigueur : l’article L1132-1 du Code du travail et l’article 225-1 du Code pénal prohibent toute distinction injustifiée, qu’elle vise un salarié ou un candidat. Cette égalité de traitement n’est pas un slogan, mais un principe qui façonne chaque étape de la vie professionnelle.

La réalité déborde largement le seul moment du recrutement. Discrimination à la formation, à la promotion, à la rémunération, lors d’une sanction ou d’un licenciement : toutes les dimensions de la carrière sont concernées. L’accès aux avantages sociaux, à la couverture santé, à la formation ou aux services internes de l’entreprise peut aussi être entaché d’exclusions injustifiées.

Deux mécanismes se dessinent clairement. D’un côté, la discrimination directe : un salarié écarté ouvertement pour un motif interdit. De l’autre, la discrimination indirecte : une règle d’apparence neutre, mais qui, dans les faits, pénalise un groupe identifié. Exemple frappant : imposer une disponibilité totale, alors que cela exclut de facto certains parents.

Depuis la loi n°2012-954, une protection spécifique s’applique aux lanceurs d’alerte. Dans les entreprises de plus de 300 salariés, les recruteurs doivent désormais se former à la non-discrimination. Les outils d’audit et les systèmes de gestion des candidatures permettent de repérer plus systématiquement les biais dans les pratiques RH. La vigilance s’organise, loin d’un simple affichage, en une démarche structurée et suivie.

Quels sont les critères de discrimination reconnus et comment les identifier ?

Le droit français aligne pas moins de 25 critères de discrimination, qui couvrent des aspects très différents de l’identité ou du parcours de chacun. À côté des plus évidents, sexe, origine, état de santé, handicap, âge, figurent aussi le nom de famille, la grossesse, l’orientation sexuelle, les mœurs, l’identité de genre, les convictions religieuses, l’appartenance syndicale ou les caractéristiques génétiques. D’autres, plus inattendus, comme la domiciliation bancaire ou la qualité de lanceur d’alerte, sont également protégés. Depuis mars 2024, la discrimination capillaire s’ajoute à cette liste déjà longue.

Les critères dans le texte

Voici quelques exemples concrets de critères de discrimination inscrits dans la loi :

  • Apparence physique
  • Lieu de résidence
  • Situation familiale
  • Opinions politiques
  • Nation ou race prétendue

Détecter une mesure discriminatoire passe par une analyse concrète : il s’agit d’examiner chaque consigne, décision ou habitude et de la confronter à ces critères. Peu importe que la discrimination soit affichée ou qu’elle opère de manière insidieuse : la loi ne fait pas de différence. Interdire explicitement l’embauche de femmes en âge de procréer est un cas évident ; imposer des horaires incompatibles avec la parentalité agit de façon beaucoup plus sournoise.

Les entreprises ne laissent plus la place à l’improvisation : elles se dotent d’outils pour surveiller et corriger leurs pratiques, logiciels de gestion des candidatures, audits internes, formations ciblées. Il ne s’agit plus d’un simple ressenti, mais d’un examen détaillé des processus, appuyé sur des faits.

Deux mains de couleurs différentes se tendent au-dessus de CV

Victime ou témoin : comment agir et où trouver de l’aide ?

Se retrouver victime de discrimination, ou assister à une telle situation,, c’est souvent se heurter à un mur d’incertitudes. Pourtant, la loi pèse lourd : toute mesure basée sur un critère prohibé expose l’employeur à des sanctions sévères. L’article L1132-1 du Code du travail interdit formellement toute distinction lors du recrutement, de la gestion des carrières, de la rémunération ou de la rupture de contrat. Le Code pénal prévoit même jusqu’à trois ans de prison et 45 000 euros d’amende.

En première ligne, le Défenseur des droits intervient pour examiner les situations, accompagner les personnes concernées et proposer des solutions concrètes. Le contact se fait en ligne, par courrier ou dans l’un des points d’accueil répartis partout en France. Chaque année, plusieurs milliers de dossiers sont traités.

Les conseils de prud’hommes peuvent être saisis pour régler les litiges liés à la discrimination, individuellement ou collectivement. Un salarié reconnu victime peut obtenir réparation, et parfois même être réintégré. Depuis 2016, l’action de groupe permet de porter collectivement ces affaires devant la justice, amplifiant la portée des recours. Pour monter un dossier solide et affronter la procédure, il est conseillé de se faire accompagner par un avocat, un syndicat ou une association spécialisée.

Le statut de lanceur d’alerte bénéficie, lui, d’une protection renforcée. Signaler des faits illicites ne peut plus justifier de sanction, de licenciement ou de discrimination. Cette garantie, inscrite noir sur blanc dans la loi, vise à rééquilibrer les rapports de force et à encourager la transparence au sein des organisations.

La lutte contre la discrimination ne s’arrête pas aux textes : chaque action, chaque recours, chaque prise de parole ajoute une pierre à l’édifice. Le droit trace la voie, mais il appartient à chacun de la faire vivre, pour que l’égalité cesse d’être un simple principe et devienne une réalité tangible dans chaque entreprise.